Les cigognes blanches sont des oiseaux migrateurs, qui passent l’hiver en Afrique. Là bas, elles se nourrissent essentiellement de grillons, mais, étant opportunistes, peuvent aussi manger d’autres choses : crustacés, limaces, escargots... Et pour ce faire, elles vont passer beaucoup de temps dans les endroits favorables à ces animaux, c’est à dire prairies, mais aussi décharges. Et vu qu’en Afrique, certains pesticides sont autorisés sans qu’ils ne le soient en Europe, les cigognes peuvent ingérer ces polluants et les ramener en Europe ; comme c’est le cas en cette période avec leur retour.

Comme les oiseaux sont sensibles à l’accumulation de polluants organiques dans leur corps, l’équipe d’Estrémadure a décidé de vérifier les niveaux de contamination des polluants organiques persistants (POP), les pesticides (OCP) et des biphényles polychlorés (PCB) spécifiquement organo-chlorure. Ils ont testé 59 oisillons de trois colonies en Estrémadure (près de l’Espagne) avec différents niveaux d’exposition environnementale à des centres de traitement des déchets solides urbains ou décharges contrôlées : dans une zone protégée pour les oiseaux (zone spéciale de conservation "Llanos de Cáceres y Sierra de Fuentes") ; une autre entouré de prairies à cinq kilomètres de la décharge ; et le dernier dans une région agricole deux kilomètres d’un autre site d’enfouissement.

Les résultats, publiés dans la revue Chemosphere, ont confirmé l’absence de PCB dans le plasma des oisillons. Selon les scientifiques, ces substances actuellement interdites ont été détectées dans deux études précédentes dans les oisillons de cigognes à Madrid, dans une zone plus industrielle et la plus peuplée.

"Les PCB ont été largement utilisés dans l’industrie, notamment comme fluides diélectriques dans les condensateurs et les transformateurs, ainsi que des encres à base de solvants et des plastifiants," indique Irene de la Casa-Resino, auteur principal de l’étude, dit SINC. L’étude confirme que ces polluants environnementaux ne sont pas plus utilisés dans ce domaine de Cáceres.

Cependant, l’analyse a détecté la présence d’insecticides chlorés tels que l’heptachlore, l’endosulfan, l’aldrine et de plus grandes concentrations de DDE (dichlorodiphényldichloroéthylène, un métabolite de l’insecticide bien connu DDT) qui, malgré son interdiction, persiste dans l’environnement et s’accumule dans le chaîne alimentaire.

Bien qu’au premier abord les niveaux détectés ne posent pas un risque évident pour les oisillons, "nous ne pouvons pas éviter l’existence de problèmes chroniques liés à la présence de ces polluants," disent les chercheurs, qui soulignent que les oiseaux ne souffrent d’intoxication aiguë, sauf quelques cas isolés.

Néanmoins, le problème principal se trouve dans leurs effets à long terme en raison de risques environnementaux et leur accumulation dans les tissus adipeux des animaux. "De nombreuses études scientifiques ont démontré que la présence de ces composés dans les oiseaux peut avoir un impact sur leur succès de reproduction, rendant la coquille plus mince pouvant se briser plus facilement", souligne la Casa-Resino.

En outre, les POC peuvent affecter d’autres propriétés de reproduction des oiseaux, provoquant par exemple, la féminisation des mâles, l’inhibition et la réduction du nombre d’œufs pondus chaque fois, la modification du comportement dans le nid ou malformations chez les embryons. "Ces composés sont considérés comme des perturbateurs endocriniens ou hormonaux », explique le chercheur.

En tout état de cause, cette étude prouve, une fois de plus, que l’environnement est un tout, il est donc urgent que les différentes interdictions soient applicables à tout les pays et tout les continents du moment qu’une substance est polluante ou soupçonnée de l’être, et ce dans le cadre de la prévention.

Source (en anglais)